mercredi 27 mars 2013

Mariage malté

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Je parlais récemment d’expérimentations dans le domaine du brassage, je vais donc vous relater la suivante qui, un peu malgré moi, s’est révélée fort réussie.
Afin d’imiter les tant prisés "Barrel Aged" (vieillissement en fût) et pour simplifier vulgairement la chose, il est pratiqué par certains amateurs, un coupage direct de la bière à l’alcool fort. Si outre-atlantique le bourbon semble avoir la cote, tout goret que je suis, je me devais bien d’user de quelques scotchs ! :)
Cette première tentative s’est donc opérée sur un gras stout faiblement volté (5.5%) et bigrement gros (DF=1022). L’additif fut un jeune sherry cask de haute volée, rien de moins que le fameux Dailuaine 98/08 embouteillé par notre ami Jean Marie Kovacs de chez Jean Boyer au titre de 60.9% pour célébrer la seconde édition de l’interplanétairement renommé plus grand festival de whisky au monde, le Whisky In The Church qui se déroule annuellement à La Haye. Un whisky puissant mais jamais agressif, plein de fruits secs, vanille, caramel, épices… Le mélange fut dosé à hauteur de 2% en volume soit une demi-bouteille pour 18l, montant ainsi le titre alcoolique de près de 1% tout de même. 

8 semaines plus tard vint le jour du face à face entre la version nature et celle au whisky.


Quelle surprise de constater à quel point le whisky a métamorphosé la bière, la rendant à la fois plus intense mais aussi bien plus complexe. Il faut dire que la version nature a probablement souffert d’une surcarbonatation en raison de l’imprécision du dosage du sucre à l’embouteillage d’un seul flacon. La texture en prenant un coup, le rendu final a sans doute  été biaisé. Toutefois, la comparaison fut saisissante avec cette version Dailuaine de toute beauté, distillant son lot de café chocolaté allié à la douceur vanille/fruits secs/épices du whisky. Très bonne expérience à renouveler !




Pour avoir réalisé plusieurs tests en mélangeant directement au verre sur un autre stout, je conseille plutôt un alcool moelleux et gourmand tel que ce sherry cask, un rhum tout en rondeur, un bourbon vanillé, un irlandais souple et fruité ou un whisky de grain bien parfumé. Sont à éviter les whiskies sherry ou tourbés trop secs qui cassent l’harmonie et rendent le mélange facilement alcooleux.
A vous maintenant de tenter l’expérience !

-Pierrot
 

lundi 18 mars 2013

Nøgne

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La semaine passée, la France s’est vu gratifiée de la visite de Kjetil Jikiun, le maître brasseur de la très réputée brasserie norvégienne Nøgne. Passant par Paris, Lyon ou encore Lille, Kjetil nous a fait l’immense plaisir d’achever son périple sur une étape nancéenne. Cette rencontre ne pouvait avoir lieu que dans un seul repère du nord-est, La Capsule à Nancy !

Donc ce jeudi  14 mars, en entrant dans la boutique, ce n’est pas un homme banal que j’ai rencontré mais un colosse avoisinant le mètre 95, d’âge mûr, à la barbe grisonnante, le sourire jusqu’aux oreilles et affublé d’un short et de chaussures de randonnée. Un short par temps de neige… ça me rappelle quelqu’un ça… :)  Ce grand bonhomme affable fut d’une accessibilité déconcertante, n’hésitant pas à répondre à de nombreuses questions tout en s’intéressant lui-même aux visiteurs. Une vraie crème comme l’on dit par chez nous, un homme qui était plus présent pour échanger que pour promouvoir ses produits.

Pour fêter l’événement, 2 bières de la maison étaient dispensées au fût, à savoir :
- Citra IPA, de couleur rouge ambré, la bière est ronde, caramélisée avec un joli fruité et une amertume très douce. Son but étant d’initier au houblon, c’est plutôt réussi même si ce n’est pas ma tasse de thé.
- Saison IPA, levure belge et houblons australiens (Galaxy/Stella), 7.5% et 40 IBU. Etant fan de saisons belges, je peux vous garantir que dans le style, celle-ci est une bombe ! Peut-être la meilleure expression qu’il m’ait été donné de goûter à ce jour ! Blonde avec une jolie mousse qui tient, le nez est très citronné avec une touche "sour ale", les levures s’expriment bien, ça donne soif ! La bouche est sèche comme attendu, rien d’acide mais bien amer et persistant en bouche. Pour illustrer, imaginez une saison Dupont, un poil plus forte, houblonnée 2 fois plus avec une touche exotique et vous obtenez cette merveille dangereusement buvable.  Du grand art !

En tout cas, ce fut un grand moment et je tiens à remercier tout le monde, Kjetil, le grand brun du Brewberry (Paris) qui fut le guide de notre norvégien préféré, et nos 2 hôtes, Cédric et François dit les  "Capsule Brothers " (of death). Merci à tous et à bientôt.





-Pierrot

PS : Pour les pauvres qui n’auront jamais eu la chance de connaître ces merveilles au fût, vous avez de la veine les petits gras, car vos cavistes révolutionnaires proposent les Nøgne en bouteille sur leur webshop ! Alors Foncez !!!
 

vendredi 8 mars 2013

Sherry Cask Whiskies

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S'il est un mariage magique à mentionner entre le new spirit et le fût, c’est bien celui du sherry cask ! Même si dans les plus grands whiskies que j’ai pu déguster à ce jour, on retrouve sans problème d’autres types de fût (bourbon & co), il faut bien admettre que les fûts ayant préalablement contenu du sherry (Xérès) permettent une maturation unique et quelquefois terriblement fantastique. J’en veux pour preuve mes trois whiskies favoris, tous trois tirés de fûts de sherry, à savoir :

-          Laphroaig 74/05 pour La Maison Du Whisky (49.7%), qui n'est ni plus ni moins que le mélange parfait entre tourbe, bois fumé et fruits exotiques. Après avoir goûté une telle merveille, on peut réellement mourir heureux !
-          Glenfarclas 68/09 cask 699 (51.2%), ici on a affaire à la plus parfaite pina colada (rhum, ananas, coco) agrémentée de confiture de framboise, de mandarine, d’une touche viandée et de que ne sais-je d’autre encore qui vous met à genoux.
-          Longmorn 72/10 de The Perfect Dram (51.3%), grandiose alliance de notes de cuir, d’épices, de bouillon de bœuf, de dattes et raisins confits et de fruits exotiques.

Tout ça pour dire que new spirit + sherry cask fonctionne, et plutôt bien ! Mais voilà, ce type de maturation d’origine historique risque de disparaître ou tout au moins de se raréfier. Je dis "historique" puisque c’est l’excessive consommation de sherry par les britanniques durant le 19ème et une partie du 20ème siècle qui a permis de fournir nombre de fûts aux distillateurs. A l’heure actuelle, la consommation a énormément chuté et les distilleries se sont davantage tournées vers d’autres types de fûts, comme ceux de bourbon.
Néanmoins, certaines d’entre elles essayent de rester dans la tradition, comme c’est le cas pour Glendronach qui sort toujours des versions récentes en sherry cask. Pour illustrer ce propos, je vais vous présenter une mise en bouteille relativement récente mais tout de même assez âgée d’un millésime phare de la distillerie :


Glendronach 39 yo 1972/2011 (49.9%, OB, Oloroso Sherry Butt, cask # 712, 466 bottles)



Avec un premier nez légèrement brut, sur un boisé puissant teinté de vernis, le bestiau s’ouvre vite sur des fragrances plus douces telles que la praline caramélisée et cette inextricable touche "Glendro 70’s" vraiment unique et reconnaissable entre mille que j’assimile au mélange complexe entre rhum vieux au citron, viande rassie et humus enrobé de fumée chocolatée. On retrouve également les épices et le cuir, le tout arrosé d’une touche vineuse (sherry) et accompagné d’une note acidulée apportant de la fraicheur à l’ensemble. Un tableau à la fois noir et sexy… bluffant !
La bouche parait un poil plus sèche mais reste magnifique, reprenant le bois, la fumée, la terre et la noisette, le tout agrémenté d’une touche fruitée à tendance exotique (passion) mais aussi plus traditionnelle avec la prune.

La finale est boisée, épicée et un poil rooty (réglisse) sans qu’aucune astringence désagréable ne vienne vous assécher le palais. Ce malt n’est que velours à siroter au coin du feu pendant les longues soirées d’hiver tout en prenant son temps, car l’aération est si bénéfique à ce type de whisky qu’il serait un crime de ne le laisser nous dévoiler tout son panache. 

A la vôtre.

-Pierrot

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